lundi 14 juillet 2008

Des cris, de la tristesse, de la souffrance, du larmoyant, ... bienvenue au 20h !!


Une terrible nouvelle vient de se produire ...
Un accident de car sur l'autoroute A6 ...
Un enfant est décédé ...
D'autres grièvement blessés ...

Les enfants âgés d'environ 10 ans, se rendaient sur Paris pour y suivre la rencontre de gala de l'équipe de France 98', face à la sélection mondiale. Un garçon de 10 ans est mort dans l'accident, et trente autres personnes, parmi lesquelles d'autres enfants du même âge, ainsi que des accompagnateurs et un chauffeur, ont été de légèrement à gravement blessés.

A priori, ce dernier n'était pas sous l'emprise de l'alcool, et se serait fait couper la route par un véhicule immatriculé en Belgique (ça ne change rien qu'il soit Belge, mais bon, je me contente de relater ...), qui se serait donc rabattu alors qu'un autre véhicule, (Belge lui aussi) tentait de la doubler. La collision de la voiture BELGE, aurait alors projeté le car dans un fossé allant de 3 à 4 mètres, selon les sources.
Les conductrices (et oui, c'était des femmes !! Aucun intérêt de le souligner non plus, mais rappelez vous, je ne qu'un humble narrateur) des 2 véhicules BELGES (qui revenaient d'un séjour en Ardèche, information ici capitale), et le chauffeur du car ont des versions qui ne concordent pas l'une avec l'autre.
A noter aussi, que le chauffeur du bus venait de faire une pause, à peine 30 min avant l'incident. Il est tout de même intéressant de noter que si le chauffeur n'avait pas fait cette pause, cet accident ne se serait sûrement jamais produit ...
Bon, peut-être qu'un autre, plus grave aurait eu lieu, mais ça, nous ne le saurons jamais !

Pour le moment, aucun scénario n'est considéré comme définitif, et un appel à témoin a été lancé (03 85 97 34 17, on ne sait jamais), notamment pour retrouver une soit disant, 3e voiture, elle aussi impliquée dans l'accident.

Voilà, le plus sèchement possible l'info telle qu'elle a été raconté pendant le journal.
On aurait pu s'en tenir là, mais c'était sans compter sur la "nouvelle" mode des JT ... : l'émotionnel !!
Au lieu de passer à l'information suivante, un autre reportage a été proposé avec au sommaire, l'arrivée des familles des victimes filmée en zoom x500, et interview de ces derniers sur leurs sentiments du moment.

Et quelle ne fut pas ma stupeur de constater, à ma grande surprise ébahie, que ces proches, parmi lesquels les frères, les soeurs, et autres grands-parents, étaient tristes ...

Incroyable stupéfaction d'entendre des sanglots à droite à gauche dans ces images où les familles donnent leurs sentiments sur l'accident.
Après tout, leur enfant n'a que failli mourir dans un accident de bus.

Mais cette compassion malsaine ne s'arrête pas là.
Arrive l'interview d'un grand père, la voix remplie de larmes, qui se mets à raconter comment la veille du départ il avait serré son petit fils dans ses bras, tout en disant de bien en profiter, qu'il allait bien s'amuser durant son voyage.

Un autre père déclarait sous l'oeil de la caméra qu'il venait juste d'arriver, et qu'il ne connaissait rien de l'état de santé de son fiston. Nous pouvons nous demander comment un père peut-il rester à dialoguer ne serait-ce qu'une seconde avec un journaliste, alors qu'il ignore tout du devenir de son rejeton. Certes son visage était catastrophé mais bizzarement, je l'aurai plus imaginé en train de repousser le journaliste et son micro, afin d'accourir au plus vite au chevet de son gamin.

Et l'espace d'un instant, on se met à espérer une révélation en direct ...
Le père court voir son enfant, suivi de près par le journaliste, et là, accompagné d'une musique douce et émouvante, le diagnostic du médecin tombe, et ce dernier annonce la tétraplégie de son fils, qui par conséquent, ne pourra plus jamais marcher. A ce moment là, le père pleure et va rejoindre son chérubin, qui ignore encore tout de sa destiné. Puis le papa annonce la nouvelle, et fond en larmes dans les bras de son fils, pendant que la caméra opère un zoom sur l'accolade, avant de finir par un plan de la porte de la chambre d'hôpital qui se ferme, mais tout en maintenant le son du perchiste resté dans la chambre à son maximum, nous laissant encore dans l'intimité de cette famille dont la vie ne sera plus jamais la même ... !!

Ca, c'est du JT mes agneaux !!
Ca, c'est de l'info brute de décoffrage !!

Ensuite, nous avons les classiques parmi les classiques, les commentaires de ceux qui n'ont rien perdu, au profit de ceux qui ont perdu.
C'est ainsi qu'un père a pu déclarer qu'il était de tout coeur avec les autres parents qui avaient des enfants grièvement blessés, tout en soulignant la chance qu'il avait que son enfant ne soit pas plus gravement touché.

Bref, une "déclaration clichée", vue et revue, et qui peut s'adapter à toutes les situations mettant en scène des blessés.

Mais là n'est pas le problème.
On ne peut pas jeter la pierre à ses familles, qui se contentent d'exprimer comme elles le ressentent leur tristesse face à cette tragédie. Les mots qui sortent ne sont pas préparés, se sont là de "purs moments d'émotion", et il n'y a bien sûr rien à redire là-dessus.

Le problème tient plus dans l'exploitation que la télévision fait des ces images !
A quoi bon montrer ces images de détresse des familles ?
Y a t-il un intérêt quelconque à voir ces personnes pleurer ?
N'est-ce pas du voyeurisme plutôt que de l'information ?

Pleurer à la télé semble être devenu la nouvelle mode, la nouvelle formule magique pour faire rester le public.
Pourtant, on serait tenté d'attendre d'un journal de 20h d'une grande chaîne nationale, un déterminisme culturel, un dessein d'instruire les téléspectateurs (si tenter que la télévision puisse instruire qui que ce soit ...).
Au lieu d'un décryptage minutieux ou d'une analyse avec un tant soit peu de profondeur, nous devons supporter une théâtralisation des sentiments des victimes et de leurs familles.

Cette vocation de metteur de scène, ce déballage de sentiments n'a pas sa place dans un journal d'INFORMATIONS !
D'autres émissions existent pour ça (Jours après jours, Toute une histoire, Ca se discute ...).
Alors je sais bien que de voir pleurer les autres peut nous donner, nous qui allons si bien, nous qui pour le moment sommes en bonne santé, un sentiment de bien-être encore plus fort compte tenu des épreuves terribles qui tombent sur les autres.

Mais n'oublions pas qu'un jour, nous pouvons tous être confronté à un drame, et que ce jour là, mieux vaut avoir la larme facile, car faute de quoi, l'ouverture du 20h nous échappera ...

1 commentaire:

Anonyme a dit…

pelle "faire de l'information sensationnelle" c'est ce qui marche de nos jours car les gens aiment ça malheureusement. Un bras déchicté par là, une maman en pleur de l'autre côté, un enfant mort sur le bord... les gens ne s'en lassent pas... Il faudrait simplement que chacun ait vu "pour de vrai" ne serait-ce qu'une fois la détresse d'une mère devant le corps de son enfant ou celle d'une femme devant celui de son mari pour comprendre. Comprendre que la tristesse ça se respecte : n'est ce pas messieurs et mesdames les journalistes?